De nombreuses études ont cherché à établir la mortalité attribuable aux bactériémies à E.BLSE (16 études cas-témoins). Schwaber et al, dans une méta-analyse de 2007, avaient établi un risque accru de mortalité de 1,85 lorsqu’une E.BLSE était à l’origine d’une bactériémie. L’ensemble des études se confrontait à des écueils méthodologiques : études souvent monocentriques, variation des endpoints, de designs, de sélection des témoins, de qualité lors de méta-analyse, et des résultats souvent mal ajustés sur les comorbidités ; nécessitant de nouveaux travaux dans le domaine.
Etude de De Kraker et al en 2011 1
Cette étude récent a recherchés à évaluer la morbidité et la mortalité attribuable aux bactériémies à E.BLSE sur un panel d’hôpitaux européens. Les Escherichia coli productrices de BLSE constituent la cible de choix en raison de leur fréquence, de leur augmentation exponentielle, des impasses thérapeutiques et du faible niveau de connaissance de leur impact clinique. Ce travail mené sur une période de 12 mois, a employé une méthodologie statistique adaptée aux objectifs par une minimisation des biais constatés lors des précédentes études. Ainsi, des analyses statistiques basées sur des régressions logistiques, de cox, des régressions linéaires généralisées et une analyse multi-niveaux permettaient une réponse plus précise aux questions posées.
Au total, 3509 patients ont été inclus dans l’étude (11 bactériémies E.BLSE vs 204 témoins sans bactériémie à E.coli et 1110 E.coli sensibles vs 2084 témoins sans bactériémie à E.coli). Les bactériémies à E.BLSE étaient significativement associées aux décès (analyse multivariée E.BLSE vs témoins : 4,6 [1,7 – 12,3]) avec un lien plus fort que les bactériémies à E.coli sensible (analyse multivariée E.BLSE vs témoins : 1,9 [1,4 – 2,5]). La médiane de mortalité était de 3 jours [1-12] pour les patients bactériémiques à E.BLSE vs 7 jours [1-17] pour les patients bactériémiques à E.coli sensible. L’application des données à un modèle compétitif et un modèle linéaire généralisé retrouvaient également une mortalité accrue chez les patients bactériémiques à E.BLSE.
Estimation de la mortalité à la population Française et des couts hospitaliers:
Nous avons adapté les données de l’article de de Kraker à celle de la population hospitalière Française. En partant des hypothèses suivantes : il y a 56 hôpitaux en France, 10% de mortalité lors de bactériémie à E.coli. Le réseau EARSS compte environ 8000 bactériémies à E.coli en France par an. Les bactériémies à E.BLSE représentent environ 320 cas par an en France. La mortalité attribuable à la résistance aux C3G dans la population de patients bactériémiques à Escherichia coli est de l’ordre de 15,9% [1,9 – 37,1] et le nombre de décès attribuable est de l’ordre de 128/an [16-297]. Les extensions de durées de séjours sont de +24500 journées d’hospitalisation [14363– 33 800] par rapport à des patients sans bactériémie à E.coli ce qui représente 32,6 millions d’€ [11,9 – 67,6]. La comparaison à des patients bactériémique à E.coli sensible donne des extensions de durées de séjours de +1600 jrs [128 – 3264] et un surcout de 2,2 millions d’€ [0,2 – 4,4].
Conclusion
Les bactériémies à E.BLSE ont un impact non négligeable sur la mortalité des patients affectés par cette pathologie. Il est urgent de trouver de nouvelles thérapeutiques. L’effet collatéral de l’émergence de ces bactéries multi résistantes dans la communauté doit nous faire prévoir de lourd coûts économiques et sociaux.
1. de Kraker ME, Wolkewitz M, Davey PG, et al. Burden of antimicrobial resistance in European hospitals: excess mortality and length of hospital stay associated with bloodstream infections due to Escherichia coli resistant to third-generation cephalosporins. J Antimicrob Chemother 2011;66:398-407.